FIDH: Trois ans de harcèlement à l’encontre de Maâti Monjib et de six défenseurs des droits humains
Ciblés par les autorités depuis 2014, sept défenseurs des droits humains marocains sont la cible de harcèlement judiciaire en raison de leurs activités en faveur de la liberté d’expression dans le pays. Le 28 mars 2018, la justice marocaine a reporté pour la dixième fois consécutive leur procès. La prochaine audience aura lieu le 27 juin 2018.
Maâti Monjib, Hicham Mansouri, Hisham Almiraat, Mohamed Essabr et Abdessamad Ait Aicha, sont poursuivis pour « atteinte à la sécurité de l’État » en raison de leurs activités de défense des droits humains menées au sein de l’Association marocaine des droits numériques (ADN), de l’Association marocaine pour le journalisme d’investigation (AMJI), de l’Association marocaine pour l’éducation de la jeunesse (AMEJ) et du Centre Ibn Rochd d’études et de communication. Ils risquent entre un et cinq ans d’emprisonnement, sur la base de l’article 206 du Code pénal marocain [1]. Parmi ces défenseurs, certains sont notamment poursuivis pour avoir animé des formations portant sur l’utilisation de l’application « Story Maker » dispensées par le Centre Ibn Rochd et l’AMEJ – en partenariat avec l’ONG néerlandaise « Free Press Unlimited ».
Rachid Tarik et Maria Moukrim sont accusés d’avoir reçu un financement de l’étranger pour le compte de l’AMJI, sans en avoir notifié la réception au secrétariat général du gouvernement. Si les charges sont confirmées, ils risquent une amende pouvant aller jusqu’à 10 000 dirhams (environ 1,000 euros), sur la base de l’article 8 de la Loi de 1958 réglementant le droit d’association. Ces deux défenseurs sont visés en leur qualité de président et d’ancienne présidente respectivement de l’AMJI.
Fabriquées de toutes pièces, les charges pesant contre les sept défenseurs visent à les faire taire et discréditer leur combat en faveur de la promotion de la liberté d’expression et d’information, y compris à travers l’application « Story Maker » [2].
Les sept défenseurs visés par ce procès sont tous affiliés à des organisations ayant cherché à encourager cette forme de journalisme citoyen et qui pour certaines d’entre elles sont aujourd’hui la cible de restriction à leur liberté d’association en représailles :
L’association Freedom Now qui s’est donnée pour mission la défense de la liberté d’expression et de la presse au Maroc se voit opposer un refus d’enregistrement de la part des autorités. Ainsi, après s’être pourvue en justice suite à son interdiction, la Cour d’Appel administrative de Rabat a confirmé le 7 février 2017 que Freedom Now ne pouvait exercer ses activités dans le pays ;
Le Centre Ibn Rochd d’études et de communication qui menait des études notamment sur la démocratie et les droits humains et dispensait des formations y compris sur l’application « Story Maker » est fermé depuis 2014 suite à une décision du ministère de l’Intérieur de suspendre ses activités ;
L’Association marocaine pour le journalisme d’investigation (AMJI) qui promeut le journalisme d’investigation, la liberté de la presse et le droit à l’accès l’information dans le pays se voit aujourd’hui dans l’incapacité d’exercer ses activités alors que les autorités en refusent l’enregistrement ;
L’Association marocaine pour l’éducation de la jeunesse (AMEJ) contribue à la formation de jeunes journalistes ;
L’Association marocaine des droits numériques (ADN) « veut faire d’Internet un outil au service de la liberté des citoyens » et contribuer à dévoiler les pratiques de surveillance électronique illicites menées par le régime marocain à l’encontre de journalistes, chercheurs et militants des droits humains.
Pour la plupart actifs dans le Mouvement du 20 février, les défenseurs engagés dans la promotion de la liberté d’information et de la presse sont particulièrement visés par des actes d’intimidation et de répression depuis 2014 alors que le ministre de l’Intérieur accusait devant le Parlement marocain, les organisations de défense des droits humains de suivre des priorités de l’étranger et d’entraver la lutte contre le terrorisme. Ainsi, certains ont fait l’objet d’agressions, d’autres de harcèlement judiciaire. Tous rapportent être étroitement surveillés.
Entre autres, l’Association marocaine des droits humains (AMDH) se voit interdire de manière quasi-systématiq