Communiqué du Comité Radi&détenus politiques à propos de l’arrestation de l’universitaire et historien Maati Monjib
Le Comité de Casablanca pour la liberté d’Omar Radi et tous les prisonniers d’opinion a appris avec une grande inquiétude l’arrestation arbitraire de l’universitaire et défenseur des droits humains Maati Monjib, mardi après-midi dans un restaurant de Rabat, par des agents de police en civil qui l’ont déféré devant le procureur général du Roi.
Le procureur général du Roi a déféré à son tour M. Monjib devant le juge d’instruction qui, après interrogatoire de première comparution, a ordonné sa mise en détention provisoire en fixant le 20 janvier comme date d’ouverture de l’enquête approfondie.
Le Comité de Casablanca pour la liberté d’Omar Radi et tous les prisonniers d’opinion condamne cette attaque flagrante contre la liberté et les droits fondamentaux du Dr Maati Monjib, dans ce qui semble être l’achèvement des dernières étapes du processus d’assèchement des sources de résistance à l’autoritarisme et à la tyrannie dans le pays.
Dans ce processus, le régime ne cesse depuis des années d’emprisonner arbitrairement des journalistes indépendants, des défenseurs des droits de l’homme et différentes voix dissidentes en fomentant des dossiers et en usant d’accusations liées aux mœurs pour les décrédibiliser. Après avoir examiné les différents communiqués du parquet général à ce sujet, le Comité souhaite attirer l’attention sur ce qui suit :
– L’arrestation du Dr Maati Monjib, qui intervient dans un contexte politique caractérisé par la tension et le blocage, procède de la persécution sécuritaire et du harcèlement judiciaire à son encontre qui durent depuis des années, dans le but de le dissuader de poursuivre ses activités universitaires, médiatiques et de défense des droits de l’homme. Cet acharnement se manifeste dans le fait que certaines plateformes médiatiques proches des services de sécurité le décrivent parfois comme « l’ennemi n° 1 » et visent le cercle de ses proches par des campagnes diffamatoires violentes et immorales.
-Ce harcèlement n’a pas cessé au cours des cinq dernières années. Dr Maati Monjib et six autres militants ont été précédemment accusés de porter atteinte à la sécurité de l’État, ainsi que d’autres chefs d’accusation.
Le procès ouvert en 2015 contre lui a été reporté plus de 20 fois jusqu’à présent, sans fournir de raisons probantes. Monjib a répondu présent à toutes ces audiences.
-En parallèle, tout au long de cette période et jusqu’à la date de son arrestation, Dr Maati Monjib ainsi que des membres de sa famille ont été une cible constante de la presse de diffamation proche des services de sécurité. Ces pressions se sont étendues au domaine de son travail universitaire et n’ont pas épargné les organisations et les associations dans lesquelles il est considéré comme actif.
-Les membres de la famille de Dr Monjib ont à leur tour été récemment soumis à une série d’interrogatoires par la Brigade nationale de la police judiciaire au sujet « d’actes qui constitueraient des éléments constitutifs du crime de blanchiment d’argent ». Des accusations que Dr Monjib a publiquement réfutées, mettant les autorités au défi de fournir des preuves.
– La manière avec laquelle a été arrêté Dr Maati Monjib dans un lieu public est arbitraire et entachée de violations manifestes, car il n’a reçu aucune convocation à une adresse connue pour comparaître devant le parquet. De plus, la fin de l’enquête préliminaire dans une affaire spécifique ne permet en aucun cas l’arrestation du suspect surtout en l’absence de flagrant délit. Ce qui signifie que Maati a été déféré arbitrairement et sans convocation devant le juge d’instruction. Il a aussi été interrogé en l’absence de ses avocats.
– Comme dans le cas des journalistes Omar Radi et Soulaimane Raissouni, l’arrestation de Dr Maati Monjib a été précédée d’une violente campagne de diffamation lancée par un média connu pour sa proximité avec les services de sécurité.Pire encore, cette plateforme avait précédemment publié un compte-rendu reprenant les détails de l’enquête préliminaire menée par le parquet en violation flagrante du principe de confidentialité. Ce support médiatique de diffamation a même prédit l’imminence de son arrestation, un schéma répété au point de devenir la méthode adoptée par les services.
– Dr Maati Monjib a toujours répondu présent suite à toutes les convocations à comparaître devant les autorités judiciaires compétentes et s’est conformé aux procédures judiciaires en vigueur. Ce qui laisse dire que son arrestation aujourd’hui sous prétexte d’ « approfondir la recherche » a clairement un caractère de représailles et de punition pour ses positions critiques de la corruption et de la tyrannie , sa défense de la liberté d’opinion et d’expression, et son courage et sa franchise dans la dénonciation des violations des droits de l’homme.Sur la base de ce qui précède, le Comité de Casablanca pour la liberté d’Omar Radi et tous les prisonniers d’opinion au Maroc :
Appelle à la libération immédiate de l’universitaire et défenseur des droits humains, Dr Maati Monjib, et à mettre fin à toutes les formes de persécution qu’il a injustement subies pendant des années.
– Salue vivement la résistance du professeur Dr Maati Monjib tout au long de ces années de harcèlement continu, son refus de s’incliner et son attachement à exprimer ses positions et ses opinions, et sa présence permanente dans toutes les batailles pour la liberté d’expression et le respect des droits humains, pour l’indépendance de la presse et les valeurs de la démocratie.
– Renouvelle sa condamnation du maintien en détention provisoire des journalistes Omar Radi et Soulaimane Raissouni, de la prolongation délibérée des délais de traitement judiciaire et l’atermoiement procédural dans la conduite des enquêtes dans les deux affaires, afin de continuer à les torturer psychologiquement.
-Exige la libération de tous les prisonniers politiques, les prisonniers d’opinion, de divers mouvements sociaux ainsi que les citoyens qui ont été arrêtés pour avoir exprimé leurs opinions.- Salue l’appel lancé par le « Comité national de solidarité avec Maati Monjib et les six activistes » et l’Association marocaine des droits humains (AMDH) appelant à unir les efforts entre les différents comités de solidarité avec les prisonniers d’opinion et toutes les composantes du mouvement des droits humains et les forces vives du pays, pour former une force afin de contrer les graves régressions sur le plan des droits humains et exprime sa volonté de s’engager dans toute démarche allant dans ce sens.